Longtemps considérée comme un cas désespéré au point de vue économique, l’Afrique sub-saharienne est en train de connaitre ses meilleures performances de croissance depuis les premières années post-indépendance
Des pays tels que l’Éthiopie, le Rwanda et l’Ouganda connaissent des performances soutenues depuis le début des années 2000.
Mais jusqu’à présent, la croissance en Afrique noire a été tirée par les ressources naturelles et la suppression de certaines distorsions politique du passé.
La productivité nationale à été stimulée par une augmentation de la demande pour les biens et les services domestiques (surtout les services comme la téléphonie mobile) et une utilisation plus efficace des ressources. Le problème est qu’il n’est pas évident de voir quelle pourrait être l’origine d’éventuels gains de productivité dans le moyen terme à cause du problème sous-jacent de la faiblesse de la transformation structurelle des économies Africaines.
Moins de 10% des travailleurs en Afrique noire sont employés dans le secteur manufacturier, et parmi ceux-ci seule une infime fraction est employée dans des entreprises formelles modernes disposant d’une technologie adéquate. En fait, le continent au sud du Sahara est moins industrialisé aujourd’hui qu’elle ne l’était dans les années 1980. L’investissement privé dans les industries modernes (hors ressources naturelles), n’a pas augmenté et reste trop faible pour soutenir la transformation structurelle.
Des pays présentés comme des success-stories (Rwanda , Uganda, Tanzanie, Ethiopie), ont connu une croissance regulière et importante de leur PIB. Les dernières études sur l’industrialisation du continent ont montré que les croissances étaient tirées par les services non échangeables, en particulier la construction, les transports et les hôtels et restaurants. Le secteur public domine toujours l’investissement et l’essentiel de cet investissement public est financé par des dons étrangers.
« La caractéristique dominante du paysage économique du continent est un secteur informel comprenant des micro-entreprises » souligne Lansana Gagny Sakho
Les pays de l’Asie de l’Est ont connu des croissances rapides en reproduisant, dans un laps de temps beaucoup plus court, l’expérience des pays avancés.
Ils ont transformé leurs agriculteurs en ouvriers de fabrication, ont diversifié leurs économies et exporté une gamme de produits de plus en plus sophistiqués. Les agriculteurs africains se ruent vers les villes. Mais ils ne retrouvent pas des industries manufacturières modernes comme en Asie de l’Est, ils se mobilisent par conséquent dans des services tels que le commerce et la distribution au détail. Mais, dans le continent, ces services ne sont pas dynamiques technologiquement et sont loin des standards de ce qui se fait ailleurs dans le monde.
La caractéristique dominante du paysage économique du continent est un secteur informel comprenant des micro-entreprises, la production des ménages et les activités non officielles. Ce secteur absorbe la force de travail urbaine qui augmente et sert de filet de sécurité sociale.
Mais des études empiriques ont montré que le secteur informel ne peut pas fournir le dynamisme productif qui fait défaut au continent.
Deux décennies d’expansion économique sur le continent ont généré des attentes d’emplois décents pour la jeunesse, sans réellement augmenter considérablement la capacité de les fournir. Ce sont des conditions qui rendent probable l’émergence de la protestation sociale et d’instabilité politique. La prise en compte des attentes de la jeunesse devra passer par une augmentation de taux de transformation structurelle de l’économie et l’inclusion sociale.
La planification économique du continent ne doit pas continuer à être fondée sur de simples extrapolations de la croissance. Ce qui manque à nos pays, ce sont des industries commerciales modernes qui peuvent transformer le potentiel en réalité en agissant comme le moteur interne de croissance de la productivité.
Lansana Gagny Sakho