
La corruption est une entrave majeure au développement. Elle a un impact disproportionné sur les pauvres et les plus vulnérables du fait de l’augmentation des coûts et de la diminution de l’accès aux services de base. La Banque mondiale combat la corruption depuis près de trente ans et, depuis le discours du président Wolfensohn sur le « cancer de la corruption » (a) en 1996, elle a piloté différentes initiatives pour lutter contre ce fléau et renforcer les institutions.
Aujourd’hui, nous exploitons tout le potentiel des innovations numériques et solutions technologiques pour améliorer la transparence et la reddition de compte. Cette orientation est motivée par la demande d’efficacité des pays clients, la nécessité de protéger les investissements climatiques qui devraient atteindre 100 milliards de dollars par an d’ici 2030, l’intensification des efforts de recouvrement des avoirs volés et les exigences croissantes de la population en matière de redevabilité.
Les GovTech, un accélérateur de réformes systémiques
Les transformations induites par la technologie dans l’administration publique (ou GovTech) s’attaquent aux faiblesses institutionnelles qui favorisent la corruption. En associant des solutions numériques à des réformes plus larges de la gouvernance, les GovTech peuvent démanteler la corruption systémique lorsqu’elles sont adaptées aux contextes locaux et mises en œuvre au sein d’un écosystème favorable.
Les solutions numériques optimisent la prestation des services publics en améliorant la couverture, l’accessibilité et l’efficacité, tout en limitant les risques de corruption. Par exemple, la dématérialisation du traitement des autorisations et des licences à partir de portails gouvernementaux minimise les possibilités de corruption et de favoritisme.
Comment les solutions GovTech s’attaquent-elles à la corruption ?
Voici un aperçu de la manière dont des solutions numériques spécifiques ciblent les différentes causes de la corruption. Le tableau complet est consultable ici (a).
Système institutionnel | Causes de la corruption | Types de corruption | Solutions GovTech | Exemples |
Contrôle de l’information | Asymétries d’information | Délit d’initié, trafic d’influence | Portails d’administration en ligne, initiatives de libre accès aux données, plateformes de transparence numériques | Nigéria : Le projet pour l’emploi et la gestion des dépenses publiques a mis en place un portail de gestion des finances publiques en ligne qui améliore le suivi des dépenses et réduit les risques de corruption. |
Transparence et procédures | Manque de transparence, procédures complexes | Pots-de-vin, collusion, commissions illégales | Plateformes décisionnelles publiques, numérisation des procédures, flux de travail numériques | Moldova : La numérisation des services publics a simplifié les procédures réglementaires, réduisant la corruption et les coûts de mise en conformité des entreprises. |
Abus de pouvoir | Opacité, interférence politique | Clientélisme, népotisme, enrichissement illicite | Blockchain, contrôle via IA ou apprentissage automatique, pistes d’audit numériques, recrutement fondé sur le mérite | Inde : Les tests en ligne d’admissibilité des enseignants ont rationalisé l’accréditation, éliminé les intermédiaires et réduit la corruption. |
Lacunes dans la prestation de services | Demande importante, coût trop élevé | Pots-de-vin, partialité, favoritisme | Portails de services en ligne, outils de transparence des coûts, applications mobiles | Inde : Dans le domaine de l’assurance agricole, les transferts directs de prestations ont permis de payer directement les agriculteurs, en évitant les intermédiaires et en minimisant les risques de corruption. |
Redevabilité et capacités | Supervision insuffisante, inadéquation salariale | Détournement de fonds, pots-de-vin, violations de l’intégrité | Tableaux de bord de suivi en temps réel, systèmes de paie transparents, plateformes de participation citoyenne | Zambie : Les systèmes d’information de la gestion financière ont amélioré le suivi des dépenses du secteur de la santé et la transparence des salaires. |
Exemples d’impact concret
Les solutions GovTech ont produit des résultats mesurables dans diverses régions. En voici quelques exemples :
- La dématérialisation des procédures réglementaires en Moldavie a permis de limiter les possibilités de corruption.
- Au Pakistan, un système d’examen en ligne a éliminé les intermédiaires pour l’accréditation des enseignants.
- En Inde, l’initiative de transfert direct de prestations d’assurance a permis de garantir des paiements directs et transparents aux agriculteurs.
- Aux Philippines, la tenue électronique des dossiers et les systèmes d’identification numérique ont permis d’améliorer les processus de vérification et de s’assurer que l’aide parvenait aux bénéficiaires ciblés.
L’écosystème technologique anticorruption
Selon nos analyses, les quatre conditions fondamentales suivantes doivent être réunies pour que les GovTech soient efficaces.
- Infrastructure technologique : la fiabilité des réseaux internet et électrique est essentielle.
- Compétences numériques : les fonctionnaires comme les citoyens doivent être en mesure d’utiliser efficacement les systèmes numériques.
- Cadres juridiques : les procédures numériques doivent être reconnues par la loi pour garantir leur respect et leur légitimité.
- Culture institutionnelle : les gouvernements doivent faire preuve de transparence et de redevabilité.
La mise en œuvre des GovTech n’est cependant pas sans risque. Les préoccupations concernant la confidentialité, l’exclusion numérique des populations marginalisées et la dépendance à l’égard de fournisseurs de technologie externes posent des problèmes importants. La Banque mondiale cherche à atténuer ces risques en veillant à ce que les solutions soient inclusives, adaptées au contexte et intégrées à des réformes de gouvernance plus larges.
Agissons pour inscrire l’avenir de la lutte contre la corruption dans les GovTech
Pour combattre efficacement la corruption, les GovTech doivent être déployées dans le cadre d’un écosystème global de réformes. Les solutions doivent être adaptées aux conditions locales, intégrées aux réformes institutionnelles et conçues de manière inclusive pour servir tous les citoyens.
Lors de notre prochain Forum mondial sur les partenariats contre la corruption, les 8 et 9 avril, nous approfondirons ces sujets en explorant les approches écosystémiques de la lutte contre la corruption. Décideurs politiques, donateurs, spécialistes des technologies et citoyens sont invités à se joindre à ce moment d’échanges important.
Il nous faut œuvrer ensemble pour bâtir des structures de gouvernance transparentes et responsables qui renforcent l’autonomie des citoyens et favorisent le développement durable.
Avec la Banque Mondiale