Si la Côte d’Ivoire parvenait à améliorer la parité entre les hommes et les femmes, et à faire disparaître progressivement la plupart des discriminations à l’encontre des femmes, elle pourrait, à long terme, réaliser un gain économique de l’ordre de 6 à 8 milliards de dollars.
Tel est le principal constat du dernier rapport de la Banque mondiale sur la situation économique de la Côte d’Ivoire, qui paraît au moment où la conjoncture commence à montrer des signes d’essoufflement, après cinq ans de forte croissance.
Avec le deuxième taux de croissance du PIB le plus rapide en Afrique, le rapport rappelle que la Côte d’Ivoire a maintenu une performance excellente en 2016. Les perspectives restent bonnes, même si la croissance devrait légèrement ralentir autour de 6,5 % dans les années à venir, contre plus de 9 % enregistrés de 2012 à 2015. « Malgré ce léger repli dû à la baisse du prix du cacao et aux troubles sociaux survenus ces derniers mois, l’économie ivoirienne se porte bien. Notre rapport constate toutefois que les inégalités hommes-femmes sont toujours importantes, notamment en matière de débouchés économiques et professionnels. Or, les femmes sont un atout économique pour le pays qui pourrait accéder plus rapidement au statut d’économie à revenu intermédiaire s’il réduisait les disparités entre les hommes et les femmes », explique Pierre Laporte, directeur des opérations de la Banque mondiale en Côte d’Ivoire.
Intitulé « Et si l’émergence était une femme ? Comment la Côte d’Ivoire pourrait gagner au moins six milliards de dollars », ce cinquième rapport soutient qu’une politique en faveur de la parité hommes-femmes pourrait aider la Côte d’Ivoire à devenir un pays à revenu intermédiaire. Il souligne que des femmes mieux éduquées, avec de meilleurs accès aux soins de santé et plus de poids dans les institutions politiques, les entreprises et les familles, auraient des effets positifs sur l’ensemble de la société ivoirienne. Les auteurs du rapport, qui espèrent susciter le dialogue et favoriser l’échange d’idées, formulent également plusieurs recommandations et un plan d’action.
Le rapport note que le succès de bon nombre de pays industrialisés et émergents s’explique en partie par l’élimination des inégalités hommes-femmes. Or, la Côte d’Ivoire demeure l’un des pays du monde où les disparités entre les femmes et les hommes sont les plus fortes. Malgré des efforts sur le plan législatif, les femmes n’accèdent toujours pas aux mêmes niveaux d’éducation et débouchés professionnels que les hommes. Elles ont besoin d’un meilleur accès aux soins de santé et au planning familial.
Jacques Morisset, économiste en chef de la Banque mondiale pour la Côte d’Ivoire, et auteur principal du rapport, explique que « la promotion de la parité hommes-femmes en Côte d’Ivoire suppose une démarche triple : d’abord, une politique volontariste qui vise à réduire les inégalités à l’encontre des femmes, en particulier dans le domaine de l’éducation, ensuite, l’identification de champions et encore mieux de championnes capables de porter cet agenda et, enfin, la bonne gestion des coûts d’ajustement qui pourraient survenir dans les familles et sur le marché du travail au cours de la mise en œuvre de cette politique. »
La parité hommes-femmes est une obligation sociale et humanitaire, mais c’est aussi un instrument important de politique économique pour tout pays qui souhaite devenir un pays à revenu intermédiaire le plus rapidement possible.