Des échappatoires dans le régime fiscal du Mali en font un aimant pour le commerce illicite de l’or en Afrique de l’Ouest
Il est urgent d’exercer une diligence raisonnable sur l’or de l’Afrique de l’Ouest, comme en témoigne un nouveau rapport qui révèle des écarts dans les statistiques sur la production et sur le commerce entre le Mali et les EAU
Les pratiques fiscales du Mali applicables aux exportations d’or font de ce pays la plaque tournante du commerce illicite de l’or en Afrique de l’Ouest, selon un rapport de Partenariat Afrique Canada (www.PACweb.org) publié aujourd’hui.
Le rapport, L’Eldorado ouest-africain : Cartographier le commerce illicite de l’or en Côte d’Ivoire, au Mali et au Burkina Faso, enquête sur les problèmes liés à la gouvernance de l’exploitation artisanale de l’or dans les trois pays — et sur les vulnérabilités engendrées par le commerce illicite de l’or dans la région.
L’enquête révèle que tous les pays ont pris d’importantes mesures visant à encourager le commerce légal de l’or artisanal — un secteur qui, selon les estimations, emploie trois millions de mineurs en Côte d’Ivoire, au Mali et au Burkina Faso — telles que l’harmonisation des taxes à l’exportation à un taux de 3 %. Toutefois, Partenariat Afrique Canada a découvert que le Mali n’applique les taxes à l’exportation que sur les 50 premiers kg d’or par mois, ce qui favorise la contrebande puisque les négociants font traverser l’or en contrebande de l’autre côté de la frontière, au Mali, de manière à bénéficier d’un important allégement fiscal.
« L’application nuisible des lois fiscales par le Mali est une cause de préoccupations dans la région parce qu’elle favorise activement le commerce illicite de l’or. Les voisins du Mali sont privés d’importants revenus fiscaux puisque les négociants font traverser l’or en contrebande au-delà de la frontière pour tirer profit de l’allégement fiscal », a dit Joanne Lebert, directrice générale de Partenariat Afrique Canada.
L’application nuisible des lois fiscales par le Mali est une cause de préoccupations dans la région parce qu’elle favorise activement le commerce illicite de l’or
« Dans une large mesure, les statistiques du Mali sur l’exportation illustrent une tendance préoccupante, et il incombe aux affineurs et aux acheteurs internationaux d’exercer une diligence raisonnable accrue sur l’or exporté de ce pays afin de s’assurer que l’or est propre », a ajouté Mme Lebert.
Une analyse de la production d’or et des statistiques sur le commerce de l’or au Mali, de même que des importations d’or malien déclarées par les Émirats arabes unis, a permis de mettre en évidence des écarts majeurs dans les données rapportées. Sur une période de quatre années, les importations d’or malien par les EAU ont successivement dépassé la totalité de la production du Mali. Le Mali a déclaré une production de 40 tonnes d’or en 2013, tandis que les EAU déclaraient en avoir importé 49,6 tonnes. En 2014, les chiffres ont augmenté, le Mali déclarant une production de 45,8 tonnes et les EAU, des importations d’or du Mali s’élevant à 59,9 tonnes.
Puisqu’une grande part de la production industrielle du Mali est exportée vers les affineurs suisses et sud-africains, Partenariat Afrique Canada n’a pu trouver d’explication à ces écarts. L’ampleur du commerce illicite de l’or au Mali soulève des préoccupations quant à la paix et à la stabilité régionales et illustre la nécessité pour les centres d’affinage d’exercer une diligence raisonnable accrue à l’égard des importations.
Partenariat Afrique Canada demande au Mali d’entreprendre un examen exhaustif de son régime fiscal afin de corriger les échappatoires qui font de ce pays un aimant pour l’or produit en Afrique de l’Ouest. De plus, le rapport demande au Dubai Multi-Commodities Centre, aux EAU, d’interdire les importations d’or transporté à la main et de démontrer qu’il contrôle davantage les importations d’or.
Le rapport demande aussi aux pays producteurs d’or en Afrique de l’Ouest qu’ils harmonisent leurs politiques et leurs pratiques dans le secteur de l’or par l’entremise d’une approche régionale, semblable à celle qu’on est à mettre en œuvre au sein de l’Union du fleuve Mano pour la gouvernance des diamants.
On trouvera le rapport complet à : http://APO.af/51zsrh.