Jusqu’à présent, la Grande Muraille verte a fait couler plus d’encre qu’elle n’a reverdi le Sahel.
Lancé en 2007 par les chefs d’Etat africains, ce projet dont la folle ambition est de transformer une bande de terres arides de 7 600 km sur 15 km en rideau végétal pour lutter contre la désertification, demeure à l’état embryonnaire dans les 11 pays du Sahel concernés. Quand il n’est pas, pour des raisons d’instabilité comme au Mali, tout simplement remis à des jours meilleurs.
« Il ne s’agit pas simplement de planter des arbres. La Grande Muraille verte est un projet global de développement », plaide Nora Berrahmouni, chargée du dossier à l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), pour justifier ce maigre bilan.
La FAO, qui organisait lundi 24 septembre à Rome une réunion pour dresser un état des lieux du projet panafricain, fait partie avec le Fonds mondial pour l’environnement, la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification et l’Union européenne (UE) des quelques institutions à apporter un soutien financier et un appui technique.
« Nous soutenons cette initiative car elle s’attaque aux causes profondes [des problèmes de cette région] et peut, à travers des projets transfrontaliers, œuvrer à la prévention des conflits », a répété à Rome l’envoyé de l’UE.
ADAPTATION AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
Les autres bailleurs continuent de douter. Les précédentes expériences menées sur le continent se sont presque toutes soldées par des échecs. « Nous devons encore donner confiance, admet Almami Dampha, représentant de la Commission de l’Union africaine. Cette image de mur du Sénégal à Djibouti est mal comprise. Nous sommes engagés dans un vaste programme de restauration des terres dégradées où vivent des dizaines de millions de personnes. »
Avec pour échéance 2025. A cette date, les pays du Sahel se sont fixé pour objectif d’avoir inversé la tendance à la dégradation des terres et d’avoir réussi le pari de l’adaptation au changement climatique.
L’argent mobilisé a pour l’instant permis d’élaborer des plans nationaux. Certains, comme le Sénégal et l’Erythrée, l’ont fait sur leurs propres deniers. D’autres, comme le Burkina Faso, le Tchad, l’Ethiopie, la Gambie, le Niger ou Djibouti, se sont appuyés sur des financements internationaux. Cette étape peu visible est jugée essentielle par la FAO qui a veillé à ce que ces stratégies locales soient élaborées à l’intérieur d’un cadre régional commun.
« Cela n’a pas été simple. Il fallait être sûr que tout le monde partage les mêmes objectifs, définir des zones prioritaires d’intervention. C’est fait. Maintenant nous pouvons passer aux projets », explique Nora Berrahmouni, rappelant que le gouvernement sénégalais par exemple est déjà actif sur le terrain.
MANQUE DE FINANCEMENT
Les scientifiques se sont aussi mis en ordre de marche. L’Institut de recherche pour le développement (IRD) vient d’achever la compilation de tout le savoir agronomique accumulé depuis cinquante ans. « Il ne s’agit pas d’inventer. Beaucoup d’acquis dorment dans les tiroirs et ils n’ont jamais été utilisés », rappelle Robin Duponnois, de l’IRD.
Le site du projet: http://www.grandemurailleverte.org/
Thierry Barbaut