Plus d’un milliard d’habitants sont parvenus à sortir de l’extrême pauvreté depuis un quart de siècle. Cependant, en dépit de ces immenses avancées, plus de 700 millions de personnes dans le monde vivent encore aujourd’hui avec moins de 1,90 dollar par jour. Soit environ 10 % de la population mondiale, qui pâtit souvent d’une mauvaise gouvernance et qui est tout particulièrement vulnérable aux défis pressants du changement climatique, de la pollution, de la fragilité, des conflits, des violences et des migrations forcées.
Et, pour aggraver les choses, le principal moteur de la réduction de la pauvreté de ces vingt-cinq dernières années tourne aujourd’hui au ralenti : la Banque mondiale, qui tablait auparavant sur un taux croissance de l’économie mondiale de 2,9 % en 2019, a récemment abaissé ses prévisions à 2,6 %. Un ralentissement de la croissance qui rendra d’autant plus difficiles les efforts de lutte contre la pauvreté et plus incertains les progrès, surtout dans les pays les plus pauvres.
Venir en aide aux plus pauvres et aux plus vulnérables est la priorité de l’Association internationale de développement (IDA), l’institution de la Banque mondiale chargée des financements concessionnels aux pays les plus démunis du monde. Depuis sa création, en 1960, l’IDA a joué un rôle déterminant dans la lutte contre la pauvreté, en apportant à 113 pays un montant total de 360 milliards de dollars sous la forme de dons et de prêts à faible taux d’intérêt ou sans intérêts . Pour la seule année 2018, ses engagements ont atteint 24 milliards de dollars.
L’IDA doit régulièrement renouveler la manière dont elle s’attaque à la pauvreté. D’abord parce que la nature des difficultés auxquelles sont confrontés les pays à faible revenu évolue, mais aussi en raison des grandes tendances qui façonnent l’avenir, à l’instar de l’essor de l’économie numérique. Cette semaine, des représentants des pays donateurs et emprunteurs se réunissent à Addis-Abeba afin de discuter précisément des futures orientations de l’IDA pour son prochain cycle de financements, qui couvrira la période 2021–23. Il s’agit de faire en sorte que les objectifs opérationnels et les ressources financières de la 19e reconstitution du fonds de l’IDA (IDA-19) permettent de répondre aux ambitions collectives des parties prenantes et, surtout, aux besoins de développement des populations et des pays auxquels nous apportons notre soutien.
Les investissements consacrés à l’environnement occupent notamment une place de plus en plus importante. Car face aux dangers du changement climatique qui mettent en péril les systèmes agricoles et les moyens de subsistance, les populations les plus pauvres et les plus vulnérables sont les plus exposées et les moins équipées pour s’adapter. Dans le cadre de la stratégie du Groupe de la Banque mondiale pour le climat, les financements de l’IDA s’attachent à stimuler les investissements dans l’adaptation et la résilience et à aider les pays à opérer leur transition vers une économie bas carbone. Ce qui passe par la promotion d’une agriculture « climato-intelligente », de villes durables, d’infrastructures résilientes et de solutions fondées sur la nature, y compris pour lutter contre la pollution. Nous sommes face à des défis massifs et interdépendants, mais l’IDA — et avec elle l’ensemble du Groupe de la Banque mondiale — aidera les pays les plus pauvres à les relever et elle poursuivra avec la même énergie ses efforts pour mettre fin à l’extrême pauvreté.
Akihiko Nishio Vice-président de la Banque mondiale pour le Financement du développement
Deuxième priorité importante : faire face aux situations de fragilité, de conflit et de violence qui contribuent fréquemment à faire durer ou aggraver la pauvreté. Il faut agir, sinon, selon nos estimations, 50 % des pauvres dans le monde seront concentrés en 2030 dans des régions fragiles ou en proie à des conflits. C’est pourquoi l’IDA a multiplié par deux ses financements dans ce domaine, pour les porter de 7 à 14 milliards de dollars entre 2017 et 2020, tout en consacrant plus de 2 milliards de dollars à l’aide aux réfugiés et aux communautés qui les accueillent. Ces enjeux devraient continuer d’être au centre du cycle d’IDA-19.
De plus en plus, l’IDA s’efforce en outre de remédier aux facteurs profonds de la fragilité afin d’éviter que les tensions ne dégénèrent vers la violence. Cet axe d’action consiste notamment à garantir un travail décent à la population afin de permettre aux familles de subvenir à leurs besoins et d’épargner pour l’avenir. L’enjeu est d’autant plus grand que les pays IDA devront globalement créer chaque année 28 millions d’emplois pour ne serait-ce qu’absorber les nouveaux entrants sur le marché du travail.
D’où l’importance des investissements de l’IDA pour mettre en place les conditions qui permettent au secteur privé de grandir et de créer des emplois, et de favoriser ainsi la transformation économique des pays. De même, le « guichet de promotion du secteur privé » de l’IDA est doté d’une enveloppe de 2,5 milliards de dollars destinée à attirer les financements du secteur privé et à atténuer les risques d’investissement dans les marchés périlleux. Les premières initiatives portent par exemple sur l’accès des petites et moyennes entreprises cambodgiennes à des financements en monnaie nationale ou sur la modernisation des installations de transformation en Afghanistan qui permettra à des milliers d’agriculteurs d’accéder à de nouveaux marchés.
Cependant, il n’y a pas de véritable transformation économique sans la participation entière et égale des femmes et des hommes. Les projets financés par l’IDA accompagnent les femmes et les filles pour qu’elles prennent pleinement part à l’économie. Ils facilitent pour cela l’accès des femmes à la propriété, aux actifs matériels et aux services financiers, favorisent leur autonomie grâce à la technologie et soutiennent les entrepreneures. La population féminine représente un atout inexploité grâce auquel les pays qui en ont le plus besoin pourraient s’enrichir de plusieurs milliers de milliards de dollars.
Nous contribuons également à renforcer le capital humain en dirigeant nos investissements vers la santé, l’éducation et la protection sociale. L’IDA est la première source de financements pour l’éducation dans le monde, avec un niveau d’engagements annuels dans ce secteur proche de deux milliards de dollars , tandis que ses financements pour la santé avoisinent un milliard de dollars par an. Entre 2011 et 2018, l’IDA a contribué au recrutement ou à la formation de 8,5 millions d’enseignants, et financé des soins essentiels au profit de 657 millions de personnes.
Enfin, nous savons qu’une bonne gouvernance est une condition indispensable à la réduction de la pauvreté . Grâce au renforcement des institutions, à la mobilisation des ressources nécessaires à la prestation des services et à la promotion de la transparence et de la responsabilisation, nous aidons les pays à orienter les ressources publiques vers les plus pauvres et vulnérables, et à créer des institutions efficaces qui gagnent la confiance des citoyens et soutiennent les progrès du développement.
En collaboration avec un large éventail de partenaires — du secteur public au secteur privé, en passant par les organismes multilatéraux et les organisations de la société civile —, nous continuerons à aider les pays les plus pauvres du monde à renforcer leur économie, assurer la stabilité et garantir l’égalité des chances.
Nous sommes face à des défis massifs et interdépendants, mais l’IDA — et avec elle l’ensemble du Groupe de la Banque mondiale — aidera les pays les plus pauvres à les relever et elle poursuivra avec la même énergie ses efforts pour mettre fin à l’extrême pauvreté. Je suis convaincue que les réunions qui se dérouleront cette semaine en Éthiopie déboucheront sur un programme d’action pour l’IDA qui se focalisera sur les interventions les plus porteuses de transformations et les plus prometteuses en termes d’impact.